Évaluation culturellement valide pour les apprenants autochtones

Pour que l’évaluation soit culturellement valide, les enseignants doivent avoir conscience des codes de conduite sous-jacents, de leur propre identité culturelle et des hypothèses implicites dans les questions d’examen ou les instructions assorties aux tâches servant aux évaluations tant formatives que sommatives1.

Prenons, par exemple, la question toute simple « est-ce loin de Regina à Saskatoon? ». Un enseignant de mathématiques dirait instinctivement « environ 260 km », alors qu’un apprenant autochtone élevé de manière assez traditionnelle répondrait vraisemblablement « deux heures et demie ». Les perceptions de la culture canadienne dominante peuvent souvent diverger de celles des cultures autochtones, comme dans ce cas-ci où les uns voient le monde dans une perspective spatiale et les autres, dans une perspective temporelle.

Les mathématiques occidentales procurent une compréhension intellectuelle des choses, alors que la mathématisation autochtone les fait comprendre des points de vue affectif, physique et spirituel aussi bien qu’intellectuel. Autrement dit, les mathématiques relèvent d’une tradition de compréhension du monde fondée sur le savoir, tandis que les ainés autochtones transmettent une compréhension du monde fondée sur la sagesse.

Or, beaucoup d’apprenants autochtones peuvent s’attendre à ce que les mathématiques occidentales fassent appel à cette même forme de compréhension fondée sur la sagesse, puis juger que la tradition fondée sur le savoir sur laquelle elles reposent ne satisfait pas à leurs attentes et qu’il ne vaut donc pas la peine d’y consacrer leurs efforts. Par suite, quelque chose d’aussi élémentaire que ce que signifie « comprendre les mathématiques » est une question culturelle prêtant à des interprétations contradictoires. Enseigner selon la tradition fondée sur le savoir quand les apprenants s’attendent à un enseignement guidé par la sagesse provoque de gros chocs culturels.

Toutefois, la possibilité d’interprétations contradictoires n’existe pas seulement dans le cas des apprenants autochtones. Elle se pose aussi dans celui d’apprenants non autochtones. Il y a, à divers degrés, un choc culturel entre:

  • l’identité culturelle de nombreux apprenants (qui ils sont, d’où ils viennent, où ils vont, qui ils veulent devenir et leur langage de tous les jours)2 et
  • leur perception des mathématiques scolaires ou d’une personne qui pense, parle et se comporte comme un mathématicien.

L’évaluation n’est pas valide sur le plan culturel quand on ne tient pas compte des chocs culturels auxquels sont exposés les apprenants plutôt que de les reconnaitre et d’essayer de les atténuer.

1G. Solano-Flores et S. Nelson-Barber (2001). « On the cultural validity of science assessments ». Journal of Research in Science Teaching, vol. 38 (p. 553-573).

2J. Boaler et S. Selling (2017). « Psychological Imprisonment or Intellectual Freedom? A Longitudinal Study of Contrasting School Mathematics Approaches and Their Impact on Adults’ Lives ». Journal for Research in Mathematics Education, vol. 48 no 1 (p. 82). Accessible directement à https://saskmathfr.ca/wp-content/uploads/2021/11/JRME_Boaler_longitudinal.pdf

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